Pourquoi l’amour ne suffit pas
On a souvent en tête l’image du couple parfait, où la passion et l’entente coulent de source sans accroc. Pourtant, d’après Paula Orell, psychologue spécialiste des relations de couple, aimer à profusion n’est pas synonyme de relation durable et épanouie. À travers son expertise en thérapie Gestalt et en thérapie de couple, elle bouscule cette idée reçue : ce n’est pas la quantité d’amour ou de passion qui garantit la longévité, mais la qualité de la façon dont on gère les conflits et les imperfections quotidiennes.
L’importance des désaccords
Contrairement à la croyance populaire, une relation saine n’est pas exempte de disputes. Au contraire, Paula Orell affirme que « les couples qui durent sont ceux qui comprennent qu’on ne peut pas passer vingt ans avec une personne sans être en désaccord ». Ce constat repose sur deux principes clés :
- Reconnaître que toute relation comporte ses zones de friction : valeurs personnelles, organisation du quotidien, choix financiers…
- Accepter que la discussion, lorsqu’elle se fait dans le respect, contribue à consolider le lien plutôt qu’à l’affaiblir.
Les conflits ne sont donc pas à craindre, mais à apprivoiser. Selon Paula Orell, « discuter avec respect » devient un véritable ciment pour le couple, permettant de clarifier les désirs, de négocier et d’ajuster les attentes mutuelles.
Discuter mieux, pas pour gagner
Face aux désaccords, beaucoup adoptent la tactique du « vainqueur-perdant », où l’autre devient un adversaire à convaincre. Paula Orell et la psychologue María Esclápez insistent sur l’inverse : la discussion doit être un espace d’écoute et d’apprentissage mutuel. Pour cela :
- Déposez les armes de la compétition et renoncez à « avoir raison ».
- Reformulez ce que votre partenaire a dit pour vérifier votre compréhension.
- Accueillez ses émotions sans jugement et exprimez les vôtres clairement et calmement.
Les célèbres chercheurs John et Julie Gottman soulignent aussi l’utilité des disputes constructives : elles permettent de renforcer la confiance et de prévenir l’accumulation de ressentiment.
Cultiver la passion et le désir
Si la résolution des conflits est fondamentale, Paula Orell rappelle que l’entretien du désir joue également un rôle crucial. Au fil des années, la flamme ne brûle pas naturellement de manière constante. Les couples qui réussissent :
- Admettent que la passion peut s’estomper, mais s’investissent pour la raviver.
- Inventent des moments d’intimité : week-ends improvisés, dîner aux chandelles, petits massages.
- Explorent de nouvelles activités sensorielles ou ludiques à deux, pour sortir de la routine.
Il ne s’agit pas de rechercher la passion 24 h/24, mais de reconnaître que le désir demande parfois un petit coup de pouce.
Gérer l’attirance extérieure
Une autre dimension abordée par Paula Orell concerne l’attirance pour des tiers, qui peut survenir même dans un couple solide. Elle rappelle qu’« aimer et désirer ne sont pas synonymes ». Ressentir une attirance passagère n’équivaut pas à un désir d’abandonner son partenaire. Les couples matures :
- Reconnaissent cette attirance comme normale et n’en font pas un tabou.
- Mettent à profit ces sentiments pour évaluer leurs besoins et raviver leur propre relation.
- Maintiennent un engagement clair : choisir de rester avec l’autre malgré les tentations.
Apprendre à « aimer bien »
Finalement, Paula Orell nous invite à changer nos croyances sur l’amour : ce n’est pas un feu d’artifice permanent, mais un travail quotidien. « Il ne suffit pas de vouloir », prévient-elle, « il faut apprendre à aimer bien ». Cela implique :
- Reconnaître ses propres erreurs et s’efforcer de ne pas les reproduire.
- Mettre en place des rituels de gratitude et de reconnaissance mutuelle.
- Pratiquer l’empathie active pour comprendre l’autre plutôt que de le juger.
En adoptant ces pratiques, chaque partenaire œuvre à devenir la meilleure version de lui-même – pour soi et pour l’autre. Le résultat ? Une relation qui ne se cantonne pas à un idéal romantique, mais qui s’inscrit dans la réalité, avec ses défis et ses moments de complicité profonde.